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La grippe A (H1N1) et le droit du travail, par Eric Rocheblave, Avocat



La grippe A (H1N1) et le droit du travail, par Eric Rocheblave, Avocat
La perspective d’une pandémie grippale est présentée aujourd’hui comme un risque certain.

Dès lors, la Grippe A (H1N1) n’épargnera pas les entreprises.

Dans ces circonstances, quels sont les droits et obligations des employeurs et des salariés avant et pendant une pandémie grippale ?

Quelles mesures doivent prendre les employeurs face à une pandémie grippale ?

Les employeurs doivent prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés (Article L. 4121-1 du Code du travail).

Ces mesures comprennent :

des actions de prévention des risques professionnels ;

des actions d’information et de formation ;

la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

En outre, les employeurs doivent veiller à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

Les employeurs doivent-ils informer les salariés des risques de contamination par le virus de la grippe A (H1N1) ?

Oui. Les employeurs ont l’obligation d’organiser et de dispenser une information aux salariés sur les risques pour la santé et la sécurité et les mesures prises pour y remédier (Article L. 4141-1 du Code du travail).

Les employeurs doivent également organiser des formations pratiques et appropriées à la sécurité des salariés pour concourir à la prévention des risques professionnels (Articles L. 4141-2 et R. 4141-1 du Code du travail) :

Les formations à la sécurité ont pour objet d’instruire les salariés des précautions à prendre pour assurer leur propre sécurité et, le cas échéant, celle des autres personnes travaillant dans l’établissement (Article R. 4141-3 du Code du travail)

Elles portent sur :

les conditions de circulation dans l’entreprise (gestion des entrées et sorties) ;

les conditions d’exécution du travail (règles d’hygiène) ;

la conduite à tenir en cas d’accident ou de sinistre (en cas de contamination avérée)

l’utilisation des équipements de protection individuelle (Article R. 4323-104 du Code du travail)

Etc. Les employeurs doivent-ils modifier leur document unique d’évaluation des risques professionnels afin d’y intégrer le risque de contamination par le virus de la grippe A (H1N1) ?

Oui. Les employeurs doivent transcrire et mettre à jour dans un document unique les résultats de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs.

Cette évaluation comporte un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail de l’entreprise ou de l’établissement.

La mise à jour du document unique d’évaluation des risques est réalisée au moins chaque année, lors de toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et lorsqu’une information supplémentaire intéressant l’évaluation d’un risque dans une unité de travail est recueillie (Articles R. 4121-1 et R. 4121-2 du Code du travail).

A défaut, le risque pour les employeurs est double :

d’ordre pénal : l’infraction à l’article R. 4121-1 du Code du travail est punie d’une amende prévue pour les contraventions de la 5e classe, soit 1 500 €, 3 000 € en récidive)

et

d’ordre civil : un salarié contaminé à l’occasion de son travail peut chercher à faire juger que son employeur a, faute d’évaluation préalable du risque et de mise en œuvre de mesures de protection, commis une faute inexcusable à l’origine de sa contamination.

Les employeurs doivent-ils mettre à la disposition des salariés des masques FFP2 ?

Oui, « en tant que de besoin »…

L’employeur doit mettre à la disposition des travailleurs, « en tant que de besoin », les équipements de protection individuelle appropriés (Article R. 4321-4 du Code du travail).

Quels salariés ont « besoin » de masques FFP2 ?

La Circulaire DGT 2009/16 du 3 juillet 2009 recommande le port du masque FFP2 :

aux salariés dont le rôle en situation 5B ou 6 serait essentiel et qui seraient amenés à être en contact étroit et régulier avec des malades, leurs prélèvements ou leurs effets

aux salariés en contact étroit et régulier avec le public

aux salariés chargés de la gestion des déchets ou des ordures ménagères

aux salariés exposés directement au risque viral

Quels masques ? Des masques FFP2 ou des masques chirurgicaux ? Pour qui ?

Les équipements de protection individuelle doivent être appropriés aux risques à prévenir et aux conditions dans lesquelles le travail est accompli (Article R. 4323-91 du Code du travail).

La Circulaire DGT 2009/16 du 3 juillet 2009 rappelle que la catégorie de masque recommandée ou à envisager est de l’initiative et sous la responsabilité de l’employeur, en fonction du poste occupé par le salarié.

En effet, il appartient aux employeurs de prendre en compte la gravité du risque, la fréquence de l’exposition au risque, les caractéristiques du poste de travail de chaque travailleur, et les performances des équipements de protection individuelle en cause (Article R. 4323-97 du Code du travail).

A noter que les masques chirurgicaux ne sont pas considérés comme des équipements de protection individuelle.

Les employeurs doivent-ils consulter les CHSCT ?

Oui. Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) doit être consulté avant toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (Article L. 4612-8 du Code du travail).

Notamment, les employeurs doivent consulter le CHSCT sur les conditions dans lesquelles les équipements de protection individuelle sont mis à disposition et utilisés, notamment celles concernant la durée de leur port (Article R. 4323-97 du Code du travail).

A défaut, les employeurs s’exposent à être sanctionnés pour délit d’entrave passible d’un an d’emprisonnement et/ou amende de 3 750 €, peines doublées en cas de récidive (Article L. 4742-1 du Code du travail).

Les employeurs sont-ils responsables si les salariés n’utilisent pas les masques mis à leur disposition ?

Oui. L’employeur doit veiller à l’utilisation effective des équipements de protection individuelle qu’il met à la disposition des salariés (Article R. 4321-4 du Code du travail)

Les employeurs peuvent-ils faire payer aux salariés les masques mis à leur disposition ?

Non. Les équipements de protection individuelle sont fournis gratuitement par l’employeur qui assure leur bon fonctionnement et leur maintien dans un état hygiénique satisfaisant par les entretiens, réparations et remplacements nécessaires (Article R. 4323-95 du Code du travail).

Quelles sont les obligations des employeurs à l’égard de l’hygiène des salariés ?

Les employeurs doivent mettre à la disposition des salariés les moyens d’assurer leur propreté individuelle, notamment des vestiaires, des lavabos, des cabinets d’aisance et, le cas échéant, des douches (Article R4228-1 du Code du travail).

Quelles sont les obligations des salariés en matière de santé et de sécurité face à la Grippe A ?

Conformément aux instructions qui leur sont données par l’employeur, dans les conditions prévues au règlement intérieur pour les entreprises tenues d’en élaborer un, il incombe à chaque salarié de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail (Article L. 4122-1 du Code du travail)

Les instructions de l’employeur précisent, en particulier lorsque la nature des risques le justifie, les conditions d’utilisation des équipements de travail, des moyens de protection, des substances et préparations dangereuses. Elles sont adaptées à la nature des tâches à accomplir.

Les salariés peuvent s’exposer à des sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu’à leur licenciement s’ils ne le font pas (Cass. soc., 28 févr. 2002, n° 00-41.220 ; Cass. soc., 23 mars 2005, n° 03-42.404 ; Cass. soc., 30 sept. 2005, n° 04-40.625.)

Cela étant, il convient de souligner que le manquement éventuel des salariés n’exonère pas l’employeur des ses responsabilités en matière d’hygiène et de sécurité.

Quelles sont les obligations des employeurs en matière d’hygiène des installations sanitaires ?

Les locaux affectés aux vestiaires collectifs et lavabos doivent :

être tenus en état constant de propreté (Article R. 4228-3 du Code du travail)

être aérés conformément aux règles d’aération et d’assainissement et convenablement chauffés (Article R. 4228-4 du Code du travail).

²

Les lavabos doivent être à eau potable.

L’eau doit être à température réglable et être distribuée à raison d’un lavabo pour dix travailleurs au plus.

Des moyens de nettoyage et de séchage ou d’essuyage appropriés doit être mis à la disposition des salariés. Ils doivent être entretenus ou changés chaque fois que cela est nécessaire (Article R. 4228-7 du Code du travail).

²

Le local affecté aux douches doit être tenu en état constant de propreté (Article R. 4228-9 du Code du travail).

²

L’employeur fait procéder au nettoyage et à la désinfection des cabinets d’aisance et des urinoirs au moins une fois par jour (Article R. 4228-13 du Code du travail).

Les salariés peuvent-ils invoquer leur droit de retrait ?

Oui. Les salariés peuvent se retirer de toute situation de travail dont ils ont un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé ainsi que de toute défectuosité qu’ils constatent dans les systèmes de protection.

Les employeurs ne peuvent demander aux salariés qui ont fait usage de leur droit de retrait de reprendre leur activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection (Article L. 4131-1 du Code du travail).

Aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un salarié ou d’un groupe de salariés qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d’eux (Article L. 4131-3 du Code du travail).

Le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur prévue à l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale est de droit pour le ou les salariés qui seraient victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un représentant du personnel au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail avaient signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé (Article L. 4131-4 du Code du travail).

Cependant, le droit de retrait doit être exercé de telle manière qu’il ne puisse créer pour autrui une nouvelle situation de risque grave et imminent (Article L. 4132-1 du Code du travail).

Les employeurs peuvent-ils demander à leurs salariés d’accomplir des taches supplémentaires pour pallier aux salariés absents ?

Oui. A l’exception des représentants du personnel, les salariés « non protégés » ne peuvent pas refuser la modification de leurs conditions de travail pour accomplir des taches supplémentaires ponctuelles correspondant à leur qualification et ainsi pallier à la compression des effectifs (Cass. soc., 7 févr. 2007, n° 05-43.680

Les employeurs peuvent-ils exceptionnellement allonger la durée hebdomadaire du travail ?

Oui. En cas de circonstances exceptionnelles, certaines entreprises peuvent être autorisées à dépasser pendant une période limitée la durée maximale hebdomadaire du travail (48 heures) et la porter à 60 heures au plus (Article L. 3121-35 du Code du travail).

Cette dérogation à la durée maximale hebdomadaire absolue du travail ne peut être accordée qu’en cas de circonstance exceptionnelle entraînant temporairement un surcroît extraordinaire de travail.

Elle est accordée par le directeur départemental du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’il en existe et au vu d’un rapport établi par l’inspecteur du travail et indiquant notamment si la situation de l’entreprise requérante justifie le bénéfice de la dérogation (Article R. 3121-23 du Code du travail).

Les employeurs peuvent-ils exceptionnellement allonger la durée quotidienne du travail ?

Oui. Le dépassement de la durée quotidienne maximale de dix heures de travail effectif (Article L. 3121-34 du Code du travail), peut être autorisé dans les cas où un surcroît temporaire d’activité est imposé, notamment pour l’un des motifs suivants (Article D3121-15 du Code du travail) :

Travaux devant être exécutés dans un délai déterminé en raison de leur nature, des charges imposées à l’entreprise ou des engagements contractés par celle-ci ;

Travaux saisonniers ;

Travaux impliquant une activité accrue pendant certains jours de la semaine, du mois ou de l’année.

En cas d’urgence, l’employeur peut déroger sous sa propre responsabilité, dans ces hypothèses, à la durée quotidienne maximale du travail (Article D. 3121-17 du Code du travail).

La demande de dérogation à la durée quotidienne maximale de travail, accompagnée des justifications utiles et de l’avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’il en existe, est adressée par l’employeur à l’inspecteur du travail. L’inspecteur du travail fait connaître sa décision dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception de la demande à l’employeur et aux représentants du personnel (Article D. 3121-16 du Code du travail).

S’il n’a pas encore adressé de demande de dérogation, l’employeur présente immédiatement à l’inspecteur du travail une demande de régularisation accompagnée des justifications et avis des représentants du personnel et de toutes explications nécessaires sur les causes ayant nécessité une prolongation de la durée quotidienne du travail sans autorisation préalable.

S’il se trouve dans l’attente d’une réponse à une demande de dérogation, il informe immédiatement l’inspecteur du travail de l’obligation où il s’est trouvé d’anticiper la décision attendue et en donne les raisons.

L’inspecteur du travail fait connaître sa décision dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception de la demande à l’employeur et aux représentants du personnel (Article D. 3121-17 du Code du travail).

Les employeurs peuvent-ils suspendre le repos hebdomadaire ?

Oui. En cas de travaux urgents dont l’exécution immédiate est nécessaire pour organiser des mesures de sauvetage, pour prévenir des accidents imminents ou réparer des accidents survenus au matériel, aux installations ou aux bâtiments de l’établissement, le repos hebdomadaire peut être suspendu pour le personnel nécessaire à l’exécution de ces travaux.

Cette faculté de suspension s’applique non seulement aux salariés de l’entreprise où les travaux urgents sont nécessaires mais aussi à ceux d’une autre entreprise faisant les réparations pour le compte de la première (Article L. 3132-4 du Code du travail)

L’employeur qui veut suspendre le repos hebdomadaire en cas de travaux urgents, informe immédiatement l’inspecteur du travail et, sauf cas de force majeure, avant le commencement du travail. Il l’informe des circonstances qui justifient la suspension du repos hebdomadaire. Il indique la date et la durée de cette suspension et spécifie le nombre de salariés auxquels elle s’applique (Article R. 3172-6 du Code du travail).

Les employeurs peuvent-ils déroger au repos quotidien ?

Oui. Les employeurs peuvent, sous leur seule responsabilité et en informant l’inspecteur du travail, déroger à la période minimale de onze heures de repos quotidien par salarié en cas de travaux urgents dont l’exécution immédiate est nécessaire pour (Article D. 3131-5 du Code du travail) :

Organiser des mesures de sauvetage ;

Prévenir des accidents imminents ;

Réparer des accidents survenus au matériel, aux installations ou aux bâtiments.

Aucune limitation n’est faite sur l’étendue de cette dérogation, sous réserve d’octroyer aux salariés des périodes de repos au moins équivalentes aux périodes de réduction du repos quotidien (Article D. 3131-6 du Code du travail).

Les employeurs peuvent-ils déroger à la durée du travail de nuit ?

Oui. Si la durée quotidienne du travail accompli par un travailleur de nuit ne peut excéder huit heures, il peut être dérogé à cette limite en cas de circonstances exceptionnelles, sur autorisation de l’inspecteur du travail donnée après consultation des délégués syndicaux et après avis du comité d’entreprise ou des délégués du personnel s’il en existe (Article L. 3122-34 du Code du travail)

Les employeurs peuvent-ils modifier les horaires de travail, en faisant travailler les salariés le samedi par exemple ?

Oui. La modification des horaires de travail relève en principe du pouvoir de direction de l’employeur et constitue une simple modification des conditions de travail.

Selon la Cour de cassation, s’agissant d’un changement d’horaire consistant dans une nouvelle répartition de l’horaire au sein de la journée, alors que la durée du travail et la rémunération restaient identiques, (Cass. soc., 22 févr. 2000, n° 97-44.339) ; A défaut d’une clause contractuelle expresse excluant le travail du samedi, l’employeur, en demandant aux salariés de travailler ce jour ouvrable, fait usage de son pouvoir de direction, (Cass. soc., 17 oct. 2000, n° 98-42.264 ).

Les employeurs peuvent-ils imposer le télétravail ?

Non. Lorsque le salarié travaille déjà dans l’entreprise, l’employeur ne peut l’obliger à passer au télétravail. (Cass. soc. 2 octobre 2001 n° 99-42.727) Le refus d’un salarié d’accepter un poste de télétravailleur n’est pas, en soi, un motif de rupture de son contrat de travail (Accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005 art. 2, al. 4).

(à suivre...)

Eric ROCHEBLAVE

Avocat Spécialiste en Droit Social
Lu 3616 fois
Vendredi 28 Août 2009 - 10:03

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1.Posté par ROCHEBLAVE le 16/09/2009 10:30
Suite de L'actualité du Droit du Travail sur http://www.rocheblave.com/avocat-montpellier/

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