Les Echos - 17/02/2010
par blecourt
Le ministre du Travail, Xavier Darcos, a dénoncé hier la pratique de certaines entreprises qui utilisent les mécanismes fiscaux et sociaux pour faire partir leurs salariés de plus de 60 ans.
Le ministre du Travail, Xavier Darcos, a dénoncé hier devant l'Assemblée nationale " les entreprises qui utilisent les facilités fiscales et sociales des plans de sauvegarde de l'emploi normalement destinées aux entreprises en difficulté " pour faire partir leurs salariés de plus de 60 ans ayant tous leurs trimestres de cotisation; une manière de leur offrir des conditions de départ plus favorables, aux frais du contribuable. Il évoquait là une faille existant dans le droit du travail dans laquelle ont commencé à s'engouffrer certaines entreprises pour gérer leur pyramide des âges depuis l'an dernier.
Les exonérations fiscales et sociales
En cas de départ en retraite avant 70 ans, trois types d'indemnités exonérées d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales peuvent être versées.
Dans le cadre d'un plan social -Indemnité de départ volontaire en retraite,-Indemnité de licenciement, en général plus élevée. Hors plan social -Indemnité de rupture conventionnelle, dont le montant est au moins égal à l'indemnité de licenciement.
Le problème a surgi à la suite de l'interdiction de mettre à la retraite d'office un salarié avant 70 ans inscrite dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2009. Plus question de forcer quiconque à partir avant qu'il soit septuagénaire depuis le 1er janvier de l'année dernière. A défaut de le contraindre, il faut donc le convaincre grâce à des arguments financiers. Or actuellement, la voie la plus économe pour l'entreprise est celle du plan social : c'est le seul cas où les indemnités de départ volontaire en retraite sont exonérées d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales. C'est par exemple cette voie qu'a failli emprunter BNP Paribas (" Les Echos " du 20 janvier) mais la banque en aurait été détournée à la suite d'un coup de fil de Xavier Darcos à son président Michel Pébereau, explique-t-on rue de Grenelle.
Une question très délicate
Dans l'entourage du ministre du Travail, on confirme qu'une " réflexion est en cours sur le fait de savoir s'il faut ou pas maintenir les exonérations fiscales et sociales pour les indemnités de départ en retraite dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi pour les entreprises en bonne santé financière " . " Si une entreprise veut verser un bonus lors du départ en retraite, c'est son droit, mais ce n'est pas au contribuable de payer " , ajoute-t-on. La question est cependant très délicate. D'abord, distinguer les entreprises en difficulté de celles en bonne santé, même pour les seuls départs en retraite, est risqué pour le gouvernement. En réponse aux tenants de l'interdiction des licenciements pour les entreprises qui font des bénéfices, il explique régulièrement que ce n'est pas aux pouvoirs publics de se substituer aux employeurs pour évaluer la nécessité économique ou non d'un plan social.
En outre, la réglementation des indemnités de départ à la retraite dans les plans sociaux n'est pas la seule façon de contourner la suppression de la mise à la retraite d'office avant 70 ans. Il en existe deux autres, qui sont même plus intéressantes financièrement pour le salarié : le licenciement économique, qui offre souvent une indemnité supérieure à celle du départ à la retraite; et l'indemnité pour rupture conventionnelle. Toutes deux sont aussi défiscalisées et désocialisées