Menu
Accueil
Envoyer à un ami
Version imprimable
Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager

Informatique au travail : comment mesurer le stress lié à l'usage de l'ordinateur ?

Lundi 16 Juillet 2007

Mieux vivre avec son ordinateur : témoignage d'un spécialiste


Informatique au travail : comment mesurer le stress lié à l'usage de l'ordinateur ?
L’ordinateur est un outil professionnel mis entre les mains de non-professionnels. Un outil professionnel implique d’apprendre à le faire marcher, et d’en apprivoiser l’environnement logistique, c’est-à-dire les pannes et les problèmes de manipulation. Quelle que soit son acteur – hot line, service de maintenance, collègue logique, etc. -, le dépannage doit être rapide. Sous peine de stress. Car le travailleur considère à tort que l’ordinateur, vendu comme outil professionnel, ne tombe pas en panne. Il est d’autant plus dépourvu face à la panne que, dans 9 cas sur 10, cette dernière est due à des problèmes de connexion.


En milieu professionnel, il est indispensable de connaître le numéro de téléphone de la maintenance informatique en cas de réparation du matériel et un individu de bon niveau en informatique capable de vous débloquer immédiatement sur votre ordinateur en toute situation. En effet, rien n’est intuitif en informatique, même sur Mac Intosh. Il faut découvrir les règles de fonctionnement de votre machine mais aussi les accepter.

Dans le cas d’une panne due au matériel, il n’est pas toujours simple de remédier à ces soucis. La panne de votre ordinateur peut puiser son origine au niveau matériel, au niveau logiciel – d’où appel de la maintenance de la bureautique - ou au niveau du réseau – d’où appel à l’administrateur du réseau -. Est-ce la même personne qui intervient dans les trois cas ? Dans un certain nombre d'entreprises, et en particulier dans certaines banques, la maintenance est sous-traitée. A qui incombe la réparation ? Tout ce que demande l’utilisateur, c’est une remise en marche immédiate…

De plus, il n’est pas rare que l’intervenant se déplace pour régler en trois minutes votre problème d’imprimante et reste deux heures pour répondre à des questions sur Photoshop dont il n’est pas toujours spécialiste puisque sa fonction est de s’occuper de la partie “ hard ” de la machine… En outre, avec la multiplication des firewall, il ne sait pas comment le virus est passé et ne peut vous expliquer la cause réelle de la panne.

La croyance profonde des informaticiens, c’est qu’il n’y aura pas de panne. Donc, les informaticiens ne s’organisent pas comme les garagistes pour mettre en œuvre des solutions en cas de problème, alors qu’il devrait exister des modalités d’interventions très précises. Le réparateur ou l’administrateur du réseau parle de “ fausse manipulation ” alors que cette dernière aurait dû être prévue par le logiciel. Tout système informatique est aussi imparfait que l’individu qui l’a conçu. Les salariés ne supportent pas d’attendre, donc l’entreprise doit prévoir des dispositions en fonction du problème rencontré (matériel, logiciel, virus, etc.).

Le cas d’un mode de fonctionnement du logiciel que le salarié ne connaît pas et dont il a besoin de manière urgentissime – création d’une colonne ou d’un tableau, etc. – est plus fréquent. Aujourd’hui, la grande nouveauté est que les salariés manipulent en moyenne entre 10 et 15 logiciels : Word, Excel, navigateur Internet, Outlook Express, logiciel de facturation, etc. Les logiciels utilisés tous les matins sont plutôt maîtrisés, mais ce n’est pas la même histoire pour celui quelquefois utilisé. Dans les sièges sociaux, il existe toujours quelqu’un capable de répondre au problème rencontré. Mais dans les agences éloignées, on ne sait pas… ou plus exactement on n’ose pas avouer que l’on ne sait pas se servir d’un logiciel auquel on a été formé six mois auparavant… et que l’on utilise d’ailleurs tous les six mois ! Il faut accepter de dire qu’on ne sait pas… A un collègue proche, passe encore. Mais à un employé de l’entreprise, que l’on ne connaît pas personnellement, c’est plus dérangeant. En fait, il existe très peu d’entreprises qui mettent en place une hot-line ou qui la garde au-delà des deux mois d’implantation d’un nouveau logiciel commun à toute l’entreprise, comme un logiciel de facturation pour une banque. Il faut mettre en place un service PERMANENT de réponses aux questions de fonctionnement des logiciels.

Quatre grands problèmes sont liés aux conditions de travail.

Le premier est l’ergonomie du matériel : écran, souris, clavier, etc. Certes, on s’est beaucoup amélioré dans le domaine. Les écrans de mauvaise qualité existant comme il y a cinq ou six années ont disparu, la norme TCO ayant été adoptée par les fabricants. Mais leur taille reste problématique. Le 15 pouces est la norme, mais le 19 pouces est recommandé à partir de plusieurs heures de travail par jour sur son écran. Et l’on parle là de postes fixes. Or, l’usage des ordinateurs portables se multiplie. Un écran 15 pouces est aujourd’hui la taille maximale pour un portable. Le clavier, fixe, est d’une très mauvaise ergonomie. Si l’on peut travailler huit heures par jour sur un poste fixe, on ne peut raisonnablement travailler que deux heures par jour sur un ordinateur portable. Et dans des conditions optimales, en utilisant notamment une souris à fil… bien qu’aucune ne soit aujourd’hui vendue d’origine avec un ordinateur portable. Il faut donc limiter son temps de travail sur les PC ou Mac portables, et donc a fortiori sur les PDA, les agendas électroniques de poche aux claviers invraisemblables.

Le second problème est l’ergonomie du poste de travail. Si tout le monde connaît ce problème, les bonnes habitudes à prendre ne sont en général guère retenues, voire oubliées sitôt qu’elles sont connues. La table et la chaise doivent être réglés de façon à ce que lorsque le corps est assis, les mollets et le dos soient à la verticale, les cuisses soient à l’horizontale, les pieds touchant le sol. Il faut rappeler que les conséquences d’une mauvaise posture ne se remarquent qu’à l’âge de 40 ou 50 ans. De plus, avec la multiplication des bâtiments en verre accompagnant le développement des écrans cathodiques, on assiste dans les entreprises à une stratégie de recherche d’ombre. Ce qui fatigue les yeux c’est de devoir s’accommoder à la lumière. Il faut donc mettre à distance égale les trois éléments consultés : l’écran, le papier et le clavier. Il faut aussi la luminosité entre l’écran et ce qui se trouve derrière ne soit pas énorme – il existe un rapport de 1 à 1000 entre un écran sombre et une fenêtre en pleine lumière. D’où – même s’il n’existe pas d’idéal, l’idée de se positionner face au mur avec la fenêtre de côté. Si l’on aime que les yeux puissent se perdre dans une vue, autant en profiter lors d’une pause. Car aujourd’hui, la meilleure façon de se reposer en entreprise, c’est de se lever ! On peut également atténuer les problèmes liés aux nouveaux bâtiments sans mur par la pose de plantes. Il ne faut pas négliger également la hauteur du clavier, souvent posé sur une table et donc trop haut. Un grand journal qui venait de déménager a ainsi acheter une série de tablettes à fixer sous une table pour poser le clavier car ses journalistes, qui tapent des textes 4 heures par jour, se sont plaints au bout de deux mois de mal de dos. Il faut revendiquer le droit à avoir les mains au-dessus du clavier. C’est d’ailleurs pourquoi les écrans tactiles ne se sont pas développés.

Le troisième problème est l’ergonomie des logiciels, la plus mauvaise ergonomie aujourd’hui signalée car tous les logiciels d’entreprise – pas les logiciels type Word mais développés spécialement pour une entreprise – n’ont pas évolué depuis une dizaine d’années alors que son nombre d’utilisateurs a considérablement cru. Or, l’apparition d’Internet a montré à tout le monde les bons et les mauvais sites en matière d’ergonomie et a forgé leur esprit critique. Le logiciel d’entreprise des années 80, modifié 90 puis Euro et an 2000, est devenu insupportable. Très peu d’entre eux possèdent aujourd’hui une ergonomie de type navigateur. De plus, la dizaine de programmes utilisés par une personne ne sont pas toujours cohérents entre eux.

Quatrième et dernier problème : l’ergonomie du réseau. Dans la notion de temps de réponse, on a assisté à une inversion des valeurs. Au XIXème siècle, on fuyait les cadences, mais aujourd’hui on revendique la grande vitesse d’exécution comme confort ! En plus, le salarié ne sait pas si lorsqu’il attend, ce n’est pas parce qu’il a commis une erreur… D’autant qu’à son domicile, il dispose d’une machine en général plus performante et des temps de réponse extraordinaires. Le travailleur est d’ailleurs depuis peu dans a comparaison permanente – ce qui n’était pas le cas au temps de la sidérurgie - puisqu’il peut comparer son propre matériel avec celui de l’entreprise. C’est le cas typique du gendarme qui achète un ordinateur et l’emmène à son poste de travail.

L'ergostressie est la combinaison de la charge physique, de la charge mentale liée à l'utilisation des logiciels, du stress lié au délai de réponse et à la peur de la panne, et du plaisir lié à l'interactivité. Il faut remarquer que la charge physique n'est pas absente puisque se multiplient les cas de TMS, Troubles musculo -squelettiques, sur les bras et les mains. L'ergostressie est le syndrome de la société de l'information, et il faut en mesurer régulièrement le niveau et en repérer les principaux facteurs, car le bien être du salarié au travail en dépend.

Parmi les grandes revendications futures, on notera une amélioration des temps de réponse du système. Mais aussi des temps de formations plus adaptés et mieux organisés et des temps d'apprentissage et de rodage plus longs – avec un tuteur ou un point d’appui nommé, notamment - dans des lieux prévus à cet effet.

Dans l’adoption de la loi sur les 35 heures, on considère que la production ou la fatigue du salarié est proportionnelle au temps passé sur le lieu de travail. C’est vrai pour des industries qui transforment la matière. Mais dans les métiers du tertiaire, la production ou la fatigue n’est pas, en général, proportionnelle au temps de travail.

Dans l’ergostressie, on considère quatre facteurs qui permettent de mesurer la charge de travail. D’abord, la charge physique. Ensuite, la charge mentale, qui croit de plus en plus car travailler sur un écran c’est travailler sur de l’abstraction. Puis le stress, qui est différent de la charge mentale car c’est une réaction à des contraintes. Parmi ces contraintes figurent le délai de rendu d’un travail, la panne – ou la peur que le système sur lequel je m’appuie s’arrête de fonctionner – ainsi que les différentes méthodes dont l’objectif est d’organiser une compétition permanente entre les salariés, notamment par des techniques de comparaison. Et enfin le quatrième facteur, qui existait peu dans l’activité industrielle : le plaisir. L’utilisation d’un outil interactif est une formidable source de plaisir pour les uns mais, aussi de stress pour les autres. En effet, certains n’aiment pas avoir à réagir en permanence aux sollicitations induites par l’interactivité et à suivre le rythme de la machine. De plus, utiliser internet et les nouvelles technologies exige un apprentissage permanent, on passe d’ailleurs souvent plus de temps à découvrir qu’à utiliser… et là encore, certaines personnes préfèrent utiliser que découvrir – une grande partie des femmes en particulier – alors qu’une grande partie des hommes préfèrent découvrir qu’utiliser. ”
Lu 1666 fois