
Grenoble (Isère),
correspondance particulière.
Il est des luttes qui ont valeur d’exemple et de modèle. Celle menée par les salariés de l’entreprise Polimeri, filiale chimique du géant pétrolier italien ENI, située à Champagnier (Isère), en est le symbole. Après deux années de lutte, ils viennent d’obtenir de la Commission de Bruxelles la condamnation du cartel mondial du caoutchouc à 243 millions d’euros d’amende.
Retour sur ce conflit emblématique. Depuis septembre 2005, date à laquelle la direction annonçait la fermeture du site, au sud de Grenoble, les 250 salariés ont pris leur avenir en mains, et ont su montrer un courage et une réussite inégalés.
Tout était pourtant écrit à l’avance, par une direction qui, suite à une défaillance technique (une chaudière en panne), informait sans coup férir de la fermeture du site. La lutte s’était alors organisée, menée par l’intersyndicale CGT-CFDT-CGC et accompagnée par la sénatrice communiste Annie David.
On mesure l’impact de l’annonce de la fermeture. L’usine, classée Seveso 2, était le seul site en France à fabriquer du caoutchouc synthétique. Son arrêt devait précipiter 250 personnes au chômage, près de 400 emplois induits dans la précarité, et surtout risquait d’entraîner la filière chimique du Sud grenoblois vers des fermetures successives ; chaque établissement étant partiellement tributaire de l’activité de son voisin.
À l’automne 2005, les salariés se sont réunis en intersyndicale et ont élaboré une solution alternative validée par la direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement (DRIRE), et destinée à préserver au moins 150 emplois sur le site. La direction n’a pas donné suite à cette solution.
Fort de sa conviction, le comité d’entreprise a malgré tout poursuivi son travail et mandaté une expertise pour mieux connaître les raisons de la fermeture. La conclusion des experts a révélé que seule la logique de spéculation financière expliquait l’entêtement de la direction pour la fermeture, au détriment de la réalité industrielle et sociale. Logique d’autant plus singulière que le site de Champagnier avait bénéficié de près de deux millions d’euros d’aides publiques au titre de l’environnement pendant sept années, et de cinq millions d’euros d’allégement de cotisations sociales.
Au pied du mur, les salariés de l’entreprise ont mené une lutte courageuse et emblématique. Recherchant en permanence le dialogue avec la direction, refusant d’être enfermés dans une logique conflictuelle, ils ont occupé les locaux du site tout en le protégeant. Le tribunal qui avait été alors saisi par la direction afin d’expulser les salariés a d’ailleurs refusé la demande d’expulsion, arguant qu’aucun agissement n’avait mis en péril la sécurité du site. Pour les observateurs, les salariés ont bien assuré la sécurité du site classé Seveso 2.
Concernant le reclassement, la direction ne proposait que trois postes dans un établissement situé dans le nord de la France, pour 250 salariés ! Si l’intersyndicale est parvenue à trouver des solutions pour la plupart des salariés (préretraite maison, préretraite d’État FNE, etc.), aujourd’hui, il reste malgré tout encore une douzaine de personnes sans emploi. L’usine est aujourd’hui en cours de démontage. Par petits morceaux elle part en containers vers l’Inde, où Polimeri l’a vendue. Elle devrait être remontée à Bombay, pour redémarrer en 2009. Malgré l’usine sur le départ et le bilan amer, l’exemplarité de ce combat demeure. Les moyens utilisés par les salariés, soucieux de défendre leurs emplois, mais aussi de respecter la légalité, et d’assurer la sécurité, dans un environnement hostile et défavorable, ont finalement eu gain de cause.
Et c’est aujourd’hui une victoire qui est passée par l’Europe, pour l’intersyndicale et tous ceux qui ont pris part au conflit social, dont Marie-George Buffet, mais aussi Alain Camas, premier adjoint à la mairie de Vizille.
La Commission de Bruxelles avait été saisie par l’intersyndicale en mai 2006. Après plus de dix-huit mois d’enquêtes la Commission vient de condamner le cartel mondial du caoutchouc, constitué de cinq grands producteurs - dont Polimeri -, à verser 243 millions d’euros d’amende pour entente illicite sur les prix et les parts de marché, de 1993 à 2002 ; l’entreprise Polimeri étant condamnée à payer 132 millions d’euros. « C’est une grande satisfaction, commente le délégué CGT Fred Vivancos : cela signifie que le plan social basé sur le licenciement économique des 250 salariés ne tient plus, et que les licenciements sont donc abusifs. Avec nos instances, nous allons étudier les possibilités de recours face au préjudice subi. »
correspondance particulière.
Il est des luttes qui ont valeur d’exemple et de modèle. Celle menée par les salariés de l’entreprise Polimeri, filiale chimique du géant pétrolier italien ENI, située à Champagnier (Isère), en est le symbole. Après deux années de lutte, ils viennent d’obtenir de la Commission de Bruxelles la condamnation du cartel mondial du caoutchouc à 243 millions d’euros d’amende.
Retour sur ce conflit emblématique. Depuis septembre 2005, date à laquelle la direction annonçait la fermeture du site, au sud de Grenoble, les 250 salariés ont pris leur avenir en mains, et ont su montrer un courage et une réussite inégalés.
Tout était pourtant écrit à l’avance, par une direction qui, suite à une défaillance technique (une chaudière en panne), informait sans coup férir de la fermeture du site. La lutte s’était alors organisée, menée par l’intersyndicale CGT-CFDT-CGC et accompagnée par la sénatrice communiste Annie David.
On mesure l’impact de l’annonce de la fermeture. L’usine, classée Seveso 2, était le seul site en France à fabriquer du caoutchouc synthétique. Son arrêt devait précipiter 250 personnes au chômage, près de 400 emplois induits dans la précarité, et surtout risquait d’entraîner la filière chimique du Sud grenoblois vers des fermetures successives ; chaque établissement étant partiellement tributaire de l’activité de son voisin.
À l’automne 2005, les salariés se sont réunis en intersyndicale et ont élaboré une solution alternative validée par la direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement (DRIRE), et destinée à préserver au moins 150 emplois sur le site. La direction n’a pas donné suite à cette solution.
Fort de sa conviction, le comité d’entreprise a malgré tout poursuivi son travail et mandaté une expertise pour mieux connaître les raisons de la fermeture. La conclusion des experts a révélé que seule la logique de spéculation financière expliquait l’entêtement de la direction pour la fermeture, au détriment de la réalité industrielle et sociale. Logique d’autant plus singulière que le site de Champagnier avait bénéficié de près de deux millions d’euros d’aides publiques au titre de l’environnement pendant sept années, et de cinq millions d’euros d’allégement de cotisations sociales.
Au pied du mur, les salariés de l’entreprise ont mené une lutte courageuse et emblématique. Recherchant en permanence le dialogue avec la direction, refusant d’être enfermés dans une logique conflictuelle, ils ont occupé les locaux du site tout en le protégeant. Le tribunal qui avait été alors saisi par la direction afin d’expulser les salariés a d’ailleurs refusé la demande d’expulsion, arguant qu’aucun agissement n’avait mis en péril la sécurité du site. Pour les observateurs, les salariés ont bien assuré la sécurité du site classé Seveso 2.
Concernant le reclassement, la direction ne proposait que trois postes dans un établissement situé dans le nord de la France, pour 250 salariés ! Si l’intersyndicale est parvenue à trouver des solutions pour la plupart des salariés (préretraite maison, préretraite d’État FNE, etc.), aujourd’hui, il reste malgré tout encore une douzaine de personnes sans emploi. L’usine est aujourd’hui en cours de démontage. Par petits morceaux elle part en containers vers l’Inde, où Polimeri l’a vendue. Elle devrait être remontée à Bombay, pour redémarrer en 2009. Malgré l’usine sur le départ et le bilan amer, l’exemplarité de ce combat demeure. Les moyens utilisés par les salariés, soucieux de défendre leurs emplois, mais aussi de respecter la légalité, et d’assurer la sécurité, dans un environnement hostile et défavorable, ont finalement eu gain de cause.
Et c’est aujourd’hui une victoire qui est passée par l’Europe, pour l’intersyndicale et tous ceux qui ont pris part au conflit social, dont Marie-George Buffet, mais aussi Alain Camas, premier adjoint à la mairie de Vizille.
La Commission de Bruxelles avait été saisie par l’intersyndicale en mai 2006. Après plus de dix-huit mois d’enquêtes la Commission vient de condamner le cartel mondial du caoutchouc, constitué de cinq grands producteurs - dont Polimeri -, à verser 243 millions d’euros d’amende pour entente illicite sur les prix et les parts de marché, de 1993 à 2002 ; l’entreprise Polimeri étant condamnée à payer 132 millions d’euros. « C’est une grande satisfaction, commente le délégué CGT Fred Vivancos : cela signifie que le plan social basé sur le licenciement économique des 250 salariés ne tient plus, et que les licenciements sont donc abusifs. Avec nos instances, nous allons étudier les possibilités de recours face au préjudice subi. »