Sortir du réflexe "RPS"
Trop souvent, la santé mentale au travail est résumée à un acronyme : RPS, pour Risques Psychosociaux. Ce prisme réduit les souffrances psychiques à des facteurs organisationnels ou relationnels (charge de travail, manque d’autonomie, conflits…). Si cette approche préventive reste pertinente, elle est aujourd’hui insuffisante.
Pourquoi ? Parce qu’elle élude une réalité clinique : les atteintes à la santé mentale sont aussi des pathologies.
Dépression, anxiété généralisée, épuisement professionnel, stress post-traumatique, troubles de l’adaptation... Ces diagnostics sont posés chaque jour par des professionnels de santé et concernent des milliers de salariés. Les élus du CSE doivent en avoir pleinement conscience pour adapter leur action.
Comprendre la pathologie pour mieux accompagner
Comprendre la santé mentale sous l’angle médical ne signifie pas se substituer aux psychiatres. Cela signifie :
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reconnaître les signaux faibles : repli sur soi, absentéisme récurrent, irritabilité, discours de découragement ;
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ne pas minimiser les arrêts pour souffrance psychique, mais les traiter comme des alertes collectives ;
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inscrire l’action du CSE dans une logique de prévention secondaire et tertiaire, en lien avec le service de santé au travail, le médecin du travail, les assistantes sociales ou les psychologues.
Un élu bien formé saura par exemple activer le droit d’alerte pour danger grave et imminent, ou interpeller l’employeur sur la nécessité d’un plan d’actions réel après un audit ou un baromètre social préoccupant.
La santé mentale est une question politique
En relayant les messages de la campagne gouvernementale, les élus peuvent devenir des ambassadeurs de la santé mentale au sein de leur entreprise. Mais cela suppose un changement de regard : la santé mentale n’est pas qu’une question de bien-être ou de climat social. C’est une question de santé publique et de dignité au travail.
Alors que les pathologies psychiques représentent la première cause d’arrêt de travail longue durée en France, l’engagement des représentants du personnel devient un enjeu éthique. Il ne s’agit plus de distribuer des chèques-cadeaux pour "compenser", mais de questionner les conditions de travail qui abîment psychologiquement.
Agir concrètement : pistes pour les CSE
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Intégrer la santé mentale dans la politique QVCT du CSE ;
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Demander une formation spécifique sur les pathologies psychiques liées au travail ;
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Créer un espace de parole sécurisé entre élus pour partager les signaux faibles observés ;
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Mettre à l’ordre du jour du CSE un point régulier sur les absences pour troubles psychiques, sans stigmatiser les personnes ;
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Collaborer étroitement avec les référents RPS, SSCT et les préventeurs externes.
Conclusion :
Et si l’on commençait, enfin, à prendre soin de ceux qui prennent soin des autres dans l’entreprise ?