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Le pouvoir disciplinaire de la DRH face aux supérieurs hiérarchiques : ce que dit la loi

Lundi 23 Septembre 2024

La question de savoir si la Direction des Ressources Humaines (DRH) peut sanctionner un supérieur hiérarchique est souvent au centre de débats au sein des entreprises. Cette situation, qui mêle complexité hiérarchique et autorité disciplinaire, doit être bien comprise par les élus du comité social et économique (CSE). La jurisprudence, et notamment les décisions de la Cour de cassation, apportent des éclaircissements sur ce sujet. Cet article vous explique les enjeux juridiques et pratiques de cette question, tout en offrant des conseils pour bien accompagner les salariés dans ce type de situation.


Le pouvoir disciplinaire de la DRH face aux supérieurs hiérarchiques : ce que dit la loi
Le pouvoir disciplinaire de la DRH face aux supérieurs hiérarchiques : ce que dit la loi

Le pouvoir disciplinaire : qui peut sanctionner qui ?

Selon le Code du travail, le pouvoir disciplinaire appartient à l'employeur ou à la personne à qui ce pouvoir a été délégué. L’article L.1331-1 du Code du travail précise que toute sanction disciplinaire, qu'elle soit une mise à pied, une rétrogradation ou un licenciement, doit être décidée par l’employeur ou par un représentant ayant reçu une délégation de pouvoir.

La Cour de cassation a eu l'occasion de préciser à plusieurs reprises la question de la délégation du pouvoir disciplinaire au sein de l’entreprise. En principe, la DRH peut exercer ce pouvoir si une délégation formelle lui a été accordée par l’employeur. Cependant, la situation devient plus complexe lorsqu'il s'agit de sanctionner un supérieur hiérarchique.

Le cas des supérieurs hiérarchiques : une autorité limitée pour la DRH

Dans le cadre d’une entreprise, le supérieur hiérarchique d’un salarié a souvent plus d’autorité sur l'équipe que la DRH. Ce qui peut poser problème lorsque des comportements inappropriés sont signalés au niveau de la direction des ressources humaines. En effet, si le supérieur hiérarchique est en cause, la DRH peut se retrouver dans une position délicate.

Juridiquement, la Cour de cassation a tranché sur plusieurs cas similaires, indiquant que, sans délégation expresse du pouvoir disciplinaire par l’employeur, la DRH ne peut pas directement sanctionner un supérieur hiérarchique. Le pouvoir de décision finale revient à l’employeur ou à la direction générale, ce qui signifie que la DRH doit généralement transmettre ses observations à la hiérarchie supérieure, voire à la direction générale, pour que des sanctions soient envisagées.

L’importance d’une délégation de pouvoir claire et formalisée

Les décisions de la Cour de cassation soulignent la nécessité pour l’employeur de bien formaliser la délégation de pouvoir disciplinaire. Si une délégation n’est pas clairement établie, la DRH risque de voir sa capacité d’action limitée, en particulier vis-à-vis des cadres supérieurs.

En l’absence d’une telle délégation, la DRH peut proposer des sanctions ou remonter des signalements à la direction, mais elle ne pourra pas directement infliger une sanction disciplinaire. Cela crée parfois une situation de flou, où des comportements répréhensibles peuvent perdurer faute de réaction rapide.

Les conséquences pour les élus du CSE

Pour les élus du CSE, il est crucial de bien comprendre les limites du pouvoir disciplinaire de la DRH, surtout lorsqu'il s’agit de supérieurs hiérarchiques. Cette compréhension permet de mieux accompagner les salariés en cas de conflit avec leur manager ou supérieur direct. Voici quelques conseils à garder à l’esprit :

  1. S’informer sur la délégation de pouvoir : Les élus du CSE doivent connaître la structure de délégation de pouvoir au sein de l’entreprise. Cela permet de savoir exactement qui a l’autorité pour sanctionner et quelles sont les limites de la DRH en matière disciplinaire.

  2. Accompagner les salariés dans leurs démarches : Si un salarié signale un comportement inapproprié d’un supérieur hiérarchique, les élus du CSE doivent l’accompagner et l’informer de ses droits. Ils doivent s’assurer que la procédure suit son cours et que l’employeur prend en compte le signalement.

  3. Vérifier la bonne application des sanctions : Le CSE a un rôle consultatif mais également de surveillance. Il est donc essentiel que les élus veillent à ce que les sanctions proposées par la DRH, si elles sont justifiées, soient correctement appliquées, même à l’encontre des supérieurs hiérarchiques.

Que faire en cas de conflit ou de non-application des sanctions ?

Il arrive que la direction générale ne suive pas les recommandations de la DRH ou qu’une sanction contre un cadre supérieur soit jugée trop légère par les salariés ou les élus du CSE. Dans ce cas, il est possible pour le CSE de demander des explications et d’alerter l’employeur sur l’impact que ces décisions peuvent avoir sur le climat social.

Dans certaines situations, le CSE peut également décider de faire appel à un expert indépendant pour auditer la gestion des ressources humaines et proposer des solutions pour améliorer le traitement des signalements au sein de l’entreprise.

Conclusion : un équilibre à trouver entre hiérarchie et discipline

La gestion du pouvoir disciplinaire dans les entreprises est une question délicate, notamment lorsque des supérieurs hiérarchiques sont impliqués. La DRH, bien qu’essentielle dans la gestion des ressources humaines, ne peut pas toujours sanctionner un cadre supérieur sans délégation claire. Pour les élus du CSE, comprendre ces mécanismes est fondamental pour assurer une représentation efficace des salariés et pour garantir que les sanctions soient appliquées de manière juste et équitable.

Chez Instant-CE, nous vous accompagnons dans votre rôle d’élu pour mieux appréhender ces questions complexes et vous aider à naviguer dans les différentes strates de la hiérarchie de votre entreprise. Nos formations et ressources sont à votre disposition pour vous soutenir dans la défense des droits des salariés.

Cass. soc., 26 juin 2024, n° 23-12.475

Pierre DESMONT
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